À la sortie du village, non loin de la route menant au Hartmannswillerkopf, se dresse sur un coteau une chapelle dédiée à saint Antoine l’Ermite. C’est au milieu du XIIe siècle, alors que le village d’Uffholtz dépend de l’abbaye de Murbach, que celle de Lure (Haute-Saône) achète les vignes se trouvant là. Il faut dire que Théobald de Faucolgney a été successivement abbé de Lure et de Murbach, et que le comte de Ferrette, voisin territorial, était l’avoué (défenseur) des deux abbayes. Une chapelle est rapidement construite et d’autres terres sont achetées pour permettre à un ermite ou un chapelain d’y vivre. Mais les revenus sont trop maigres pour une abbaye éloignée et en 1406, l’ensemble de la propriété est vendu à l’abbaye de Murbach. Pour la première fois sont nommément mentionnées une chapelle « Sancti-Anthonii » et une prairie « Antonymatten ».
La chapelle est fréquentée par pèlerins, malades et nécessiteux de la région qui demandent l’intercession du saint pour divers maux. Au XVe et XVIe siècles, dons et rentes augmentent les revenus. L’abbé de Murbach y nomme d’abord un chapelain, puis un administrateur laïc, souvent originaire d’Uffholtz. Au début du XVIIe siècle, on y célèbre même des mariages, un peu comme à Thierenbach de nos jours… Mais la guerre de Trente Ans (1618-1648) laisse une chapelle dont seul le chœur subsiste. Les vignes, à l’abandon, sont rapidement remises en culture par un métayer à la solde de l’abbaye. En effet, le raisin provenant du « Saint-Antoniberg » donne un vin de grande qualité, qui se retrouve souvent sur la table des moines de Murbach. Au XVIIIe siècle, les pèlerins attribuent toujours à saint Antoine le don de guérison. Même le prince-abbé de Murbach, gravement malade, y envoie, deux jours avant son décès, son confesseur pour y lire une messe. Pour booster le pèlerinage, Murbach y installe un ermite pour lequel on construit une maisonnette non loin de la chapelle. Mais à la Révolution, le tout est vendu comme bien national. Même si, après la Terreur, messes et processions reprennent, la chapelle finit quand même par tomber en ruine.
À la fin du XIXe siècle, la maisonnette disparaît dans un incendie. En 1905-1906, la famille Ingold, propriétaire des vignes, fait élever un petit oratoire carré à l’emplacement de la chapelle disparue. Mais la Première Guerre mondiale est funeste pour le petit bâtiment. La troisième et actuelle chapelle est consacrée en 1958.
Depuis quelques années, le samedi le plus proche du 17 janvier, une messe à la mémoire de saint Antoine est célébrée à l’église paroissiale. On y distribue et partage du pain. Puis les habitants d’Uffholtz et des environs se rendent de nuit en procession à la chapelle, à travers les vignes. La soirée se termine autour d’un repas, à l’issue duquel des cochons d’honneur, distinctions éphémères, sont décernés à quelques personnalités méritantes. C’est le renouvellement d’une tradition qui remonte au Moyen-Âge.
En savoir plus
Regard nouveau sur la chapelle Saint-Antoine d’Uffholtz par D. Ingold dans l’Annuaire de la Société d’histoire de Thann Guebwiller 1983-84. Remerciements à Tharcise Meyer.
Extrait de l’article « saint Antoine d’Uffholtz » par Emmanuel JOB paru dans le journal L’Alsace le 16 janvier 2019
Historique en résumé
- 1264 : Inauguration par Théodoricus, Evêque de Bâle
- 1406 : Cession de la Chapelle à l’Abbaye de Murbach
- 1622 : Bénédiction d’un 3ème autel par l’Evêque de Bâle
- 1791 : Achat de la Chapelle par Erasme Koch d’Uffholtz
- 1804 : Vente à la famille Ingold
- 1914-1918 : Destruction par faits de guerre
- 1958 : Nouvelle érection par le Comité de reconstruction d’Uffholtz
- 1986 : Restauration après profanation